L’infidélité, on en parle ou pas ?

Quel comportement adopter face à l’adultère, comment réagir? Beaucoup de questions, quelques débuts de réponses. Ne pas poster de témoignage dans cette rubrique.

Modérateur : Eugene

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Eugene
Cocu de garde
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L’infidélité, on en parle ou pas ?

Message par Eugene »

Pour la chroniqueuse de « La Matinale du Monde » Maïa Mazaurette, la question est de savoir si les conjoints ont intérêt à parler ouvertement de leurs infidélités.

Tout ce que vous direz pourra être utilisé contre vous : la formule parcourt l’imaginaire du polar autant que notre culture sexuelle. Et si le contexte associe actuellement silence et violence, confession et transgression, les choses ne sont pas toujours si dramatiques. Dans le cas de l’infidélité, le silence peut laisser passer les anges. Ou réveiller nos démons.

Avant d’aborder nos débordements, encore faudrait-il s’accorder sur la définition de l’infidélité. Le flou artistique est non seulement connu mais entretenu. Lançons donc les hostilités sans attendre : nous refusons de définir la tromperie parce qu’une règle sans contours est impossible à respecter. Côté pile, nous ne voulons pas dire, côté face, nous ne voulons pas savoir – sauf chez les polyamoureux et autres ultraminorités, qu’on serait en peine de décompter.

Le modèle normatif reste celui de LA conversation – « faut qu’on parle ». Nos représentations, nourries de comédies romantiques et de séries américaines, montrent des couples réglant leur degré d’engagement en cinq secondes, armés de pyjamas assortis et de verres de 80 litres de chardonnay. Le processus est facile, évident. Mais en pratique, personne ne se conforme au script (et aucun individu raisonnable ne boirait de chardonnay).

La première raison est biologique : en début de relation amoureuse, le déferlement hormonal nous rend virtuellement aveugles aux rivaux potentiels (University College London, 2011). Dans ces conditions, pourquoi risquer un conflit en imaginant l’inimaginable ?

Quelle place pour l’infidélité psychique ?

Libération sexuelle ou pas, nous voulons croire que l’amour protège des tentations. Du coup, pour préserver la bulle amoureuse, nous laissons nos casseroles dans le placard. Peut-être n’avons-nous pas envie de réactiver des expériences passées douloureuses. Peut-être désirons-nous entretenir le mystère, respecter une certaine pudeur. Il y a enfin une question de pragmatisme.

Nos relations précédentes nous ont probablement confrontés à deux terrifiantes réalités : non seulement le chardonnay est un cépage dégoûtant, mais nous sommes faillibles. Auquel cas nous sommes bien obligés de prendre en compte la possibilité de dérapages futurs. Pour le dire prosaïquement : nous nous taisons pour nous laisser de la marge. Pour pouvoir dire qu’on ne savait pas.

Pourtant, en théorie, rien ne s’oppose à une contractualisation de l’infidélité. On pourrait l’imaginer renégociable à chaque beaujolais nouveau. Mais nous risquerions encore une asymétrie : que se passe-t-il si l’un commence à convoiter la femme du voisin mais pas l’autre ? Devra-t-on prévoir des demi-fidélités, des systèmes de compensation – tu vas voir ailleurs, mais tu fais la vaisselle ? Si nos contrats de mariage comportent plus de clauses concernant le chien que l’exclusivité sexuelle, ce n’est certainement ni par paresse ni par oubli.

L’exigence d’exclusivité contient en outre une violence implicite indéniable : nous rendons morale une question immorale. Sous quel prétexte revendiquer, en 2017, la possession d’un corps autre ? Tes fesses sont miennes mais pas tes mains ; tes baisers mais pas tes paroles ? Comment cadrer les relations sans contact, quand 20 % des Français ont déjà connu des rapports sexuels virtuels (IFOP 2016) ? Et l’inconscient ? 28 % des femmes ont déjà fait l’amour en pensant à un autre, tandis que 51 % ont déjà fauté dans un rêve érotique (IFOP 2017). Quelle place pour l’infidélité psychique sur l’échiquier moral ?

Un tiers des femmes et la moitié des hommes

Cette complexité n’interdit pas la conversation. A condition de se munir d’un solide stock de papier-brouillon… et de quelques heures de disponibilité.

Bien sûr, vous pouvez aussi très consciemment refuser l’examen de conscience. La cachotterie fait partie du piment extraconjugal, et parmi les mille raisons qui poussent à la tromperie, l’affirmation de son individualité n’est pas la moindre. On ne veut justement plus penser pour deux, encore moins n’être qu’une « moitié ». Ce besoin d’égoïsme constitue l’une des thèses défendues par la sexothérapeute Esther Perel dans son nouvel essai, The State of Affairs. A ce titre, annoncer une infidélité serait contre-productif : si le privé redevient public, autant rester à la maison.

Même chose une fois l’acte commis : si on a évité le sujet avant, pourquoi en parler après ? Faute avouée, à moitié pardonnée… à moitié effacée ? S’il faut tromper mais parler, ou fauter mais avouer, nous voilà condamnés à découper nos aventures en morceaux : le corps contre l’âme, la liberté physique contre la possession intellectuelle, la sortie de route occasionnelle contre la soumission par défaut. Autant demander la moitié du beurre, l’argent de la pénurie et un sexto de la crémière.

D’autant que le Français lambda peut difficilement jouer la carte d’une pénitence héroïque : nous sommes, au monde, le pays le plus indulgent envers l’adultère (Pew Research Center, 2014). Un tiers des femmes et la moitié des hommes ont déjà « fauté » (IFOP 2016, 2017) : nous ne sommes pas face à un événement improbable. Loin de là.

Vider l’intégralité du linge sale

Dans ces conditions, pourquoi « en » parler ? Cependant, si réellement la culpabilité vous ronge, la sociologie vous recommande de vider l’intégralité du linge sale, sans omission. En effet, selon une étude publiée dans le Journal of Personality and Social Psychology (2014), les demi-confidences soulagent moins que la vérité entière. Elles empêchent d’aller de l’avant et augmentent le sentiment d’anxiété.

Et si l’attitude la plus généreuse consistait à se taire ? Car même avec les meilleures intentions du monde (quoique tardives), la révélation suggère une culpabilité initiale du conjoint… et une possible récidive. Vous pouvez accuser les monothéismes, le sentimentalisme, la naïveté contemporaine ou le menu de la cantine, mais vos partenaires vont prendre sur eux.

Même si vous avez trompé par pur opportunisme, même si vous jurez sur la tiare du pape François que ça n’a rien à voir avec d’éventuelles frustrations de couple, votre parole sera remise en question. Et c’est bien naturel. Les humains ont une fâcheuse tendance à chercher des causes aux événements. Et pour donner un exemple qui fâche : les femmes les plus infidèles sont aussi les moins satisfaites dans leur couple, tant sexuellement qu’émotionnellement. Alors certes, il peut y avoir de la fumée sans feu. Mais il peut aussi y avoir le feu au plancher.

Enfin, et nous entrons là dans l’eau vraiment trouble de l’infidélité, certains jouissent de voir et de laisser voir. Catherine Millet en témoignait récemment au micro de France Inter, au sujet de son roman autobiographique Jour de souffrance : « Je me servais de photos, de témoignages dans des correspondances que j’ouvrais, ça me mettait dans la tête des images, et ces images me faisaient jouir. »

Nous approchons ici du candaulisme, cette pratique consistant à observer, voire à encourager, les aventures de son conjoint. La catégorie s’appelle « cuckold » sur les plates-formes X et, pour information, ce mot-clé est 28 % plus populaire en France qu’ailleurs en Europe. Par ailleurs, les hommes sont deux fois plus susceptibles de faire cette recherche que les femmes, surtout s’ils ont entre 35 et 44 ans (Pornhub Insights, 2017). Un chiffre qui remet encore une dose de flou dans notre angle mort. On n’y voit rien. Et si c’était le but ?

Source
Those who talk behind my back, my ass contemplates
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Sans Prétention
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Re: L’infidélité, on en parle ou pas ?

Message par Sans Prétention »

Excellent réquisitoire contre la tyrannie de la vérité, le diktat de l'empathie et l'infernal refus du tout sexuel.
On regrette qu'il ne soit pas ici plus question d'égoïsme et de culpabilisation du choix de la monogamie sexuelle...

Attendez ... Ah si !

Ça y est.

Avec pareil argumentaire qui contredisent les faits statistiques (voir les origines de la tromperie sur des sites tels Gleeden et les travaux d'Esther Perel justement citée ici pour qui les causes du pas de côté ne sont pas liées au conjoint...) et très pro infidélité en disant que ce n'est pas de cela dont il est question, nous atteignons des sommets...

Et toujours la tarte à la crème : qu'est-ce que l'infidélité ?
Si le cf ne le sait pas, alors il ne se cache pas.
S'il ne peut éprouver l'ivresse du pas de côté nous dit l'article, autant "rester à la maison". C'est donc que les contours de ce que peut être l'infidélité sont clairs : c'est ce qui permet de "fauter", le plus souvent avec délice.

Maintenant il ne vous reste plus qu'à aimer l'autre "pour ce qu'il est" : mais comme vous ne savez pas ce qu'il/elle est, vous ne l'aimez que pour une image de lui/elle.

Le serpent continue de se mordre la "queue"... Lol.
Il existe pour chaque problème complexe une solution simple, directe et fausse (H.L. Mencken)
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Sans Prétention
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Re: L’infidélité, on en parle ou pas ?

Message par Sans Prétention »

L’infidélité, le signe que le couple va mal ?

Pourquoi trompe-t-on ? Un couple infidèle est-il forcément en crise ? Quand accorder son pardon ?
Jean-Claude Maes, psychologue et psychothérapeute, auteur du livre L’infidélité, paru aux éditions Eyrolles, répond à ces questions délicates
.


Mentir sur ses horaires et/ou fouiller dans le portable de l’autre… L’infidélité pousse trompeurs et trompés à des comportements regrettables. Un engrenage destructeur, dans lequel beaucoup de gens s’embourbent.

Santé Magazine : Pourquoi trompe-t-on ? Pourquoi est-on trompé ?

Jean-Claude Maes : L’infidélité solutionne à court terme un problème à long terme. En fait, c’est le symptôme d’une maladie : la crise du couple. On trompe pour éliminer les conséquences du problème mais comme on ne traite pas le problème lui-même, cette tentative est toujours vouée à l’échec. Et, lorsque c’est découvert, c’est pire, car cela engendre une crise sur la crise.
Malgré la diversité des situations, le point commun, c’est ce problème de fond entre les amoureux : manque de désir, frustrations ou sentiment d’être floué sur les termes du contrat. Par exemple :
Le problème de fond : l’un désire moins l’autre, ou fait passer travail, amis ou famille avant son couple, ou est trop pris par les enfants…
Tentative de solution : se sentant trahi, l’autre trompe en retour. Il traite ainsi son problème immédiat : frustration sexuelle ou manque affectif.

Efficace à très court terme : il ou elle résout le problème à court terme puisque cela lui permet de rester dans le couple tout en comblant son manque. Cela peut même le rendre plus cool et l’apaiser.
Nul à moyen et long terme : s’engager dans une double vie, c’est généralement aussi doubler les problèmes.

Il m’est arrivé de recevoir des couples illégitimes en thérapie… C’est tout de même un comble ! Si on va juste combler la frustration ailleurs, on ne solutionne rien du tout. En revanche, on crée de nouveaux problèmes : peur de la révélation, sentiment de culpabilité, etc.

Et si le contrat n’était pas clair au sujet de la fidélité ?

L’exclusivité sexuelle est normale. Le mot "couple" est récent, et il va de pair avec l’exclusivité sexuelle. Sans doute est-ce culturel, mais justement c’est dans cette culture que nous sommes nés et que nous avons grandi. Si quelqu’un vous dit : « Moi je ne le voyais pas comme ça, je pensais que ce n’était pas important pour toi, etc. », cette personne vous ment. Sinon, elle ne l’aurait pas fait en secret. Le cas où ce n’est pas si clair que ça, on peut l’oublier, c’est un faux prétexte.

Quant aux relations d’amour libre… C’est un tout autre contrat, qui je suppose, peut fonctionner, mais dont il faut bien constater qu’il n’est pas fréquent !

L’infidélité peut-elle aider le couple, comme certains le prétendent ?

Non, l’infidélité n’est pas une solution, mais au contraire devient une partie du problème. Je ne rencontre personne qui vive cela bien.
C’est douloureux de découvrir une infidélité. Cela peut en revanche motiver un changement de fond : donner l’occasion de résoudre le vrai problème. Elle n’aide pas le couple mais, si les problèmes qui l’ont motivée sont mis à plat, cela peut aider à sortir de la crise de couple.

Si vous êtes le trompeur, que faut-il faire pour sortir de cette crise conjugale ?

Avouer : si vous êtes percé à jour, avouez tout de suite, n’entassez pas de nouveaux mensonges sur les anciens, car le plus difficile à accepter, c’est la tromperie, la trahison, la traîtrise… En somme, plus vite on avoue avec sincérité, plus on augmente les chances de sauvegarde du couple. Vous devez pouvoir montrer à l’autre que vous avez fait une erreur. Mais attention, passer aux aveux avec des détails que la victime n’a pas demandés n’est pas un aveu bienveillant, c’est sadique ! Il faut vraiment vouloir réparer les dommages.

Demander vraiment et sincèrement pardon : le trompeur doit prendre la mesure du mal qu’il a fait à l’autre. Il doit souhaiter aborder le problème pour que l’on puisse croire de nouveau à sa sincérité : « Oui, ça n’aurait pas dû avoir lieu car j’ai rompu notre contrat » ; « Je n’ai pas eu le courage d’aborder le problème avant, je voudrais qu’on en parle vraiment maintenant. »

Si vous êtes la personne trompée, comment réagir ?

Affronter le problème : si on pardonne sans que rien n’ait été réparé, ou trop vite, ou face à quelqu’un qui ne reconnaît pas ses torts, alors on va vivre dans l’inquiétude. Il y a des gens qui ont si peur d’être seuls qu’ils acceptent de vivre avec "ça", même sans pardon, et c'est loin d'être une bonne idée ! Le reproche, la blessure et la méfiance vont continuer à planer, et cela ressortira un jour ou l’autre, mais de plus en plus gangrené.

Se remettre en question : le trompé doit s’interroger sur le problème, il ne peut pas se déresponsabiliser, car dans un couple on est deux. Il ne doit pas profiter que le trompeur est par définition en faute pour le condamner sans appel et le culpabiliser. Parfois d’ailleurs, le trompé présente des excuses : « Il me l’a dit souvent, j’aurais dû entendre. » La possibilité de pardonner va donc dans les deux sens : les griefs doivent être énoncés et entendus des deux parties.

Pardonner oui, mais seulement sous certaines conditions :
- l’autre est sincère dans ses excuses et dans sa volonté de réparer ;
- on a soi-même pris sa part de responsabilité et on est prêt à écouter les griefs de l’autre ;
- ce n’est pas la énième fois que l'infidélité se produit.

POUR TOUS : dans le cas où dialogue, ouverture et honnêteté ont été de mise, non seulement cela permet la reconstruction réelle du couple, mais cela peut renforcer les liens : « Puisque nous avons réussi à affronter cette crise, cela veut dire que notre couple est solide. » En somme, il n’y a pas de mauvaises raisons de vouloir rester ensemble, il y a juste de mauvais moyens d’y arriver.

Le livre, c’est de l’autothérapie pour se passer de consultations ?

En un sens, oui. Le livre s’adresse aux couples qui souhaitent comprendre et agir, comme le nom de la collection l’indique. Je détaille les étapes nécessaires, je donne des exemples sur différents problèmes que l’on peut rencontrer du côté du trompé et de celui du trompeur, ne serait-ce que parce que chacun a besoin de comprendre la vision de son partenaire.

Je parle aussi un peu de la troisième personne, la grande oubliée, car elle ne peut pas être la cause de tout et, elle aussi, peut pâtir sévèrement de la situation. J’explique, en outre, les raisons que l’on a de se mettre en couple et la nature du deal. Quel est l’intérêt de retrancher sur sa liberté ? Je donne enfin les bonnes raisons que l’on a de rester fidèle, et celles, moins bonnes, qui poussent à aller voir ailleurs.

Le couple, c’est fragile : il faut donc l’entretenir sans cesse et faire preuve de bienveillance à l’égard de son partenaire et de soi-même. Mais ça en vaut la peine !

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