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La science de l’adultère

Posté : ven. 16 juin 2017 15:15
par Eugene
Les gènes pirates

L’adultère est-il un atout du point de vue de l’évolution ? On sait que les rapports extraconjugaux, même s’ils restent une pratique minoritaire, font partie de la sexualité de l’être humain. Moins évident, cette pratique est peut-être bonne à prendre du point de vue de l’évolution, dès lors qu’elle donne la possibilité de disperser ses gènes sans surcoût. Inversement, elle ne l’est sans doute pas pour le conjoint chargé d’élever une éventuelle progéniture adultérine.

De nos jours, suivant les sources, on estime qu’entre 3% et 10% des pères élèveraient l’enfant d’un autre[1]. Aux États-Unis, le nombre annuel de tests de paternité vendus dans le commerce a plus que doublé entre 1991 et 2001, passant de 142 000 à plus de 300 000[2], preuve d’une inquiétude ou d’une panique morale croissante sur le sujet. Pourtant, si on essaye d’établir la médiane de cette fourchette, on observe un pourcentage mesuré de conjoints floués, oscillant autour de 6%.

Polygamie animale versus monogamie humaine

Dans les sociétés occidentales, le modèle traditionnel de la famille nucléaire qui s’est imposé depuis le Moyen Âge (i.e. un couple héréosexuel élevant les enfants qu’il a conçus), même s’il tend à se fissurer, reste à la fois majoritaire en nombre, mais surtout encouragé par les états et les institutions religieuses. Mais quel rôle ces instances jouent-elles réellement dans la solidité et la reproduction de ce modèle à travers les époques ? La famille nucléaire serait-elle également le reflet des besoins de l’espèce ?

Dans le règne animal toutes les stratégies imaginables de reproduction existent : de la monogamie du manchot empereur qui se conduit en père dévoué, à la fidélité absolue du castor dont la femelle ne cherchera pas à se reproduire avec un autre, même si son partenaire est stérile.

Toutefois, l’amour libre reste majoritaire et le schéma du mâle ou de la femelle tentant sa chance auprès du plus grand nombre est le plus courant. C’est notamment le cas chez nos cousins les gorilles, dont le mâle dominant surveille jalousement son harem, chez les chimpanzés qui pratiquent une forme d’échangisme généralisé ou pour la femelle du macaque magot, qui copule successivement avec tous les mâles du groupe (pour atteindre un rapport toutes les 17 minutes en moyenne lorsqu’elle est en chaleur[3]).

Ces pratiques différentes ayant perduré au fil des millénaires, elles semblent avoir prouvé leur pertinence du point de vue de l’évolution. Mais quelle serait, alors, la meilleure stratégie pour perpétuer une espèce : la fidélité absolue, le libertinage organisé ou une stratégie mixte ? Notre société y a répondu, au fil du temps, en adoptant la stratégie de la monogamie. Rappelons qu’en France, l’infidélité féminine constituait un délit jusqu’en 1975 (celle du mari ne l’étant que si l’adultère avait lieu au domicile conjugal). Hommes et femmes sont aujourd’hui égaux devant la loi, mais si l’adultère n’est plus un délit, il demeure encore mal perçu [4].

Des avantages en nature

Les avantages de la monogamie sont évidents du point de vue de l’évolution. Ainsi, le fœtus, dont la gestation dure neuf mois, implique de se soumettre à toutes sortes de contraintes, tandis qu’élever sa progéniture nécessite une attention de tous les instants et mobilise ainsi d’importantes ressources (temps, énergie, etc.) qui ne sont pas consacrées à d’autres activités. Les techniques et les savoirs utiles à l’éducation et à la bonne adaptation de l’enfant à son environnement sont complexes : parler, lire, écrire ou conduire une voiture nécessitent un apprentissage long et difficile, deux adultes ne sont souvent pas de trop pour assurer des revenus suffisants et un enseignement complet jusqu’à la pleine autonomie de l’enfant (si tant est que cette autonomie puisse encore être pleinement atteinte de nos jours, étant donné la complexité croissante de nos sociétés[5]). Ainsi, si la polygamie généralisée peut procurer de nombreux avantages du point de vue de l’espèce, par exemple, dans le cas des Mormons, une explosion du taux de natalité[6], force est de constater que cette stratégie n’a pas été adoptée par le plus grand nombre.

Ainsi, chez les humains, la monogamie reste une valeur sûre pour l’évolution de l’espèce. En revanche, ce choix peut toujours être optimisé, notamment pour les individus qui possèdent les qualités nécessaires pour convaincre de nouveaux partenaires d’entretenir une relation en dehors du couple. Le modèle existe déjà dans le règne animal.

Ainsi, chez le héron bleu du Mississipi, « de nombreux cas de relations extraconjugales ont été observées, le plus souvent entre une femelle dans son nid et un mâle venant du nid voisin, pendant que le « mari » de la femelle est occupé à chercher de la nourriture. La plupart des femelles ont initialement résisté, puis ont cédé, et certaines se sont mises à copuler avec une plus grande fréquence avec des partenaires extraconjugaux qu’avec leur propre partenaire. Pour réduire le risque d’être « trompé », le mâle adultère consacrait le moins de temps possible à se nourrir, revenait souvent à son nid pour surveiller sa partenaire et ne s’aventurait pas très loin dans le voisinage pour y chercher des relations extraconjugales. Celles-ci intervenaient généralement à un moment où la femelle sollicitée n’avait pas encore fini de pondre ses œufs et pouvait donc être fécondée »[7].

L’éthique est le propre de l’homme

Le héron adultère a donc adopté une stratégie mixte. Celle-ci permet de concilier la vie de famille – forme optimale pour assurer la protection et l’autonomisation des petits, et donc la survie de l’espèce – et une plus grande dispersion des gènes – qui permet de maximiser les chances de reproduction et de survie de l’espèce. Au détriment du héron trompé (et non trompeur) qui en sera réduit à nourrir une progéniture adultérine… C’est aussi la stratégie choisie, à hauteur de 6% environ, par l’espèce humaine. L’homme a été façonné par le processus de l’évolution pour laisser le plus de descendants possible, mais à l’inverse du monde animal, nous avons aussi inventé un grand nombre de règles éthiques qui régissent la vie en société. Et il est intéressant de constater que celles-ci entrent parfois en contradiction avec les stratégies évolutives. C’est le cas pour l’adultère, et c’est ce qui nous distingue des animaux.

[1] Ces données sont toujours délicates à calculer, ce qui explique un écart important entre les chiffres donnés par ces études, qui s’échelonnent de 3% à 10% : http://jech.bmj.com/content/59/9/749 ou https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articl ... 9-0138.pdf

[2] Les tests de paternité sont interdit en France, sauf en cas de décision de justice.

[3] Jared Diamond, Le troisième chimpanzé, Gallimard.

[4] Les françaises, par exemple, sont plus de 58% à redouter les dangers que celui-ci peut faire peser sur leur vie de famille http://www.lemonde.fr/societe/article/2 ... _3224.html

[5] Rémy Oudhgiri, Ces Adultes qui ne Grandiront Jamais, arkhê, 2017.

[6] Au XIXe siècle les hommes Mormons ayant une femme avaient en moyenne 7 enfants, tandis que ceux ayant deux femmes en avaient une vingtaine, cf. Le troisième chimpanzé.

[7] Ibid.

Source

Re: La science de l’adultère

Posté : ven. 20 oct. 2017 06:59
par Invité
Pour répondre aux interrogations de Sophit et à ce mail par la même occasion, l'Homme est polygame par nature.
Pas la femme (sur la durée), qui peut néanmoins recevoir de la semence de différents donneurs au moment opportun (ovulation): ceci expliquant qq fois ses errances à cette période bien précise.

"Il est certain que dans la nature, le régime le plus fréquent est la polygynie, c’est-à-dire l’association d’un seul mâle avec plusieurs femelles. Depuis les années 1960, les tenants de l’écologie comportementale analysent l’organisation sociale de la reproduction en partant de l’asymétrie fondamentale entre le potentiel reproducteur des mâles et celui des femelles. Du fait qu’un seul spermatozoïde est nécessaire pour féconder un ovule, chaque mâle est a priori capable de féconder un grand nombre de femelles. À l’inverse, une femelle ne gagne rien à multiplier les partenaires sexuels puisqu’un seul et unique mâle peut suffire à fertiliser les ovules qu’elle produit à chaque épisode de reproduction."

"Comment expliquer cependant que la monogamie soit présente, certes en moindre proportion, chez une large gamme d’espèces, des invertébrés aux vertébrés ? Chez les termites par exemple, les colonies sont fondées par un unique couple de reproducteurs. Pourquoi la polygynie ne constitue-t-elle pas le seul modèle d’association ? En fait, chez plusieurs espèces, les mâles sont assujettis à la monogamie pour des raisons d’ordre économique, les ressources essentielles à la survie n’étant pas réparties de façon à permettre le regroupement des femelles. Lorsque les ressources sont rares dans l’environnement, les femelles sont conduites à se disperser pour pouvoir les exploiter. Il devient alors impossible pour un mâle de contrôler, face à ses rivaux, un espace suffisamment riche en ressources pour accueillir l’ensemble des femelles et les progénitures à venir. Les mâles ne peuvent donc être polygynes que si les conditions environnementales l’autorisent. D’autre part, certaines contraintes anatomiques peuvent canaliser la monogamie au cours de l’évolution."

"C’est ainsi que 95 % des oiseaux sont socialement monogames, contre environ 5 % des mammifères."

Les termites, les hippocampes, les insectes en général, etc. ... rien à voir avec le sujet qui nous occupe ici. C'est tout juste bon pour les adeptes de la théorie du genre ...
Nous sommes des mammifères.

https://www.scienceshumaines.com/la-mon ... 21607.html

Re: La science de l’adultère

Posté : ven. 20 oct. 2017 07:08
par Sans Prétention
Invité a écrit : ven. 20 oct. 2017 06:59 l'Homme est polygame par nature.
Pas la femme (sur la durée), qui peut néanmoins recevoir de la semence de différents donneurs au moment opportun (ovulation): ceci expliquant qq fois ses errances à cette période bien précise.
La femme est donc également polygame par nature puisqu'elle peut recevoir plusieurs semences dans un laps de temps relativement court.

Le fait que l'homme (le dominant) empêche les petits forniqueurs de tourner autour de sa "possession" ne change rien à l'affaire : structurellement hommes et femmes sont en capacité "naturelle" d'avoir plusieurs partenaires...
Les observables n'expliquent pas les causes.

D'après de nombreux travaux de démographes et éthnologues, 80 % des sociétés connues et étudiées sont polygames "de droit" et, parmi elles, seulement 1 % polyandriques (ce qui tend à "prouver" sans en étudier les causes profondes le caractère "polygame exclusif" de l'homme). Cependant, au sein de ces société, on constate que 60 à 80 % des foyers sont monogames de fait (et non de droit), ce qui tend à montrer que l'homme serait plutôt monogame. Au moins pour des raisons économiques.

Merci de jeter un œil à cet article qui démontre que les effets dûs à l'environnement sont supérieurs à la "structure" des espèces :

https://www.google.com/amp/s/www.sante- ... elite/amp/

Et pour rappel, la polygamie, lorsqu'elle est socialement organisée se sait. Lorsqu'elle est subie, on ne parle plus de polygamie mais de manipulation.

Dernier point : l'homme est "naturellement" violent.
L'argument ne peut-il pas être philosophiquement dépassé ?